De la lutte des classes avec des « syndicats » aux
nouveaux rôles des « partenaires sociaux »
Voici un extrait de texte
de Patrick LE MOAL (ancien inspecteur du travail) pour comprendre le nouveau rôle
des « partenaires sociaux »
« Le mot
« démocratie sociale » masque le pouvoir patronal
sur l’élaboration des textes applicables.
Car il faut dissimuler les responsables des reculs sociaux imposés à celles et
ceux qui travaillent. La « baisse de compétitivité
des entreprises » est convoquée pour imposer des objectifs de rendements
toujours plus inaccessibles, des « efforts » sur les salaires, la
durée du travail. Cela dans un pays où la part des revenus détenus par les 1%
les plus riches est passée de 7 à12% entre 1980 et 2010. Mais qui va prendre les mesures ? C’est là qu’entre en jeu la fameuse « démocratie
sociale ». Ce
n’est pas la loi, ce n’est pas l’Etat, ce ne sont pas les patrons : ce sont les « partenaires sociaux » qui vont
décider « démocratiquement » de faire travailler plus pour le même
salaire, de flexibiliser le travail, et d’engager toutes les régressions
sociales.
Or l’entreprise n’est pas un lieu de démocratie et de liberté, les
syndicalistes réprimés, les salariés poussé-e-s à bout par les pratiques
managériales le savent bien. Les derniers exemples de cette « démocratie
sociale » à l’œuvre montrent sa logique. Dans la fonction publique où le
gouvernement applique sa réforme malgré le fait qu’elle n’ait pas été approuvée
par les syndicats représentant la majorité des personnels, à Air France où la négociation vise non pas à répartir
les profits de cette compagnie, mais à imposer aux pilotes de travailler plus
pour le même salaire !
C’est élégamment exprimé dans le Rapport
Combrexelle : « La question de fond est posée aux organisations
syndicales : considèrent-elles que, par
nature, la négociation collective est un instrument distributif d’augmentation
des salaires, de réduction du temps de travail, d’amélioration des conditions
de travail ? Ou admettent-elles qu’elle peut être aussi un instrument
adapté dans un contexte de crise économique et sociale ? ».
Négociation : de quoi parle-t-on ? Le rapport de force obtenu par la lutte sociale
permet d’imposer des avancées sociales dans la négociation. Mais la négociation à froid, sans rapport de force*, donne aux employeurs non seulement le pouvoir de
blocage sur toute avancée sociale, mais les moyens d’imposer des reculs sociaux en amenant les syndicats à
négocier le pistolet du licenciement sur la tempe, violence silencieuse
insupportable. Le but du Gouvernement
est d’imposer une modification fondamentale de la place de la négociation
collective en faveur du patronat ».
*Que devient le rapport de force quand il est bafoué avec des grèves de
complaisances ou des grèves bidon ?
« Il faut défendre contre ces projets mortifères l’existence de
protections légales qui permettent de protéger d’une concurrence outrancière et
assurent un minimum d’égalité entre toutes et tous. Ces protections sont des
choix politiques qui concernent toute la société, la convention collective ayant une légitimité
complémentaire, un droit des salariés pour la défense de leurs intérêts, et non
une machine au service des employeurs ».
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